L'EXPANSION DE L'ISLAM


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L'EXPANSION DE L'ISLAM

 

 

 

Après les Béni Qoraïdha, il y eut encore trois autres expéditions mineures avant celle de Hodaïbiya qui s'est déroulée la sixième année de l'Hégire. Le Prophète décida d'accomplir le pèlerinage à La Mecque en compagnie de sept cents hommes désarmés pour éviter de provoquer les Mecquois. Arrivée à Hodaïbiya, la caravane fit halte et Mohammed chargea son compagnon Othman Ibn Affan, d'informer les Qoraïchites de leurs intentions pacifiques. Mais, contrairement à la tradition établie, ceux-ci refusèrent l'entrée de la ville aux pèlerins et émirent des conditions qui semblèrent inacceptables aux Musulmans. Ils exigeaient, outre l'annulation du pèlerinage et son report d'une année, la conclusion d'une trêve de dix ans et la restitution des transfuges mecquois sans contrepartie pour les Médinois qui ne pouvaient récupérer leurs fidèles.

A la surprise générale, le Prophète accepta les termes du traité. Il fit même une autre concession qui parut  humiliante aux Musulmans et dont il a été question, plus haut. Dans la formule liminaire du traité, Ali le cousin du Prophète avait écrit : « Au Nom de Dieu, Clément et Miséricordieux. » Sohaïl le négociateur mecquois s'écria : « Nous ne connaissons ni le Clément, ni le Miséricordieux, écris comme nous avons l'habitude d'écrire : « En Ton Nom, Ô Dieu. » Arrivé à la désignation des parties contractantes, Ali écrivit : « Mohammed Envoyé de Dieu ».  « Nous ne reconnaissons pas Mohammed comme Prophète, sans quoi nous ne lui aurions pas interdit l'entrée de la Kaâba, écris : « Mohammed, fils d’‘Abdallah. » Ali se fâcha et jura de ne pas rayer les mots litigieux. Ce fut le Prophète lui-même qui les annula.  Le traité fut ensuite rédigé dans sa forme définitive  et signé par les deux parties.

Les Musulmans étaient mécontents aussi bien de la forme que du contenu. Cependant, contre toute attente, le Prophète éprouva la satisfaction d'avoir conclu un pacte  avantageux pour l’Islam. Quelque temps plus tard, en effet, les termes qui semblaient inacceptables aux fidèles,  commencèrent à donner les fruits attendus, qui contribuèrent à la consolidation et à l'expansion de l'Islam. Les Musulmans avaient été surtout choqués par le comportement des négociateurs mecquois et déçus de n'avoir pu accomplir le pèlerinage. Mais le Prophète avait des objectifs stratégiques, qui s'intégraient dans une politique à long terme et les apparentes concessions accordées, n'allaient pas tarder à jouer en faveur de la nouvelle religion.

          Le fait d'avoir négocié et signé un traité avec le Prophète, que le Salut et la Bénédiction d’Allah soient sur lui,  équivalait à reconnaître son autorité sur les Musulmans, sur les habitants de Médine et sur les tribus qui leur étaient inféodées, ce que les Mecquois avaient toujours refusé d'admettre auparavant. La trêve de dix ans qui a été décrétée,  fut mise à profit pour renforcer l'organisation religieuse, politique et administrative des territoires occupés par les Musulmans. Le report du pèlerinage loin d'être une concession devait s'avérer comme une démonstration de force. Ils étaient 700 hommes désarmés la première fois, ils seront 2 000 tous armés et équipés l'année suivante. Par ailleurs, les Mecquois auraient à quitter la ville pendant trois jours afin de laisser les pèlerins remplir leurs obligations, ce qui aurait été inconcevable auparavant. L'accomplissement du pèlerinage à une si grande échelle eut un impact psychologique considérable.

La troisième clause, d'une portée plus limitée n'avait pas eu non plus les effets escomptés par les idolâtres. Elle faisait interdiction aux Musulmans de réclamer les transfuges médinois, qui se réfugieraient auprès des idolâtres mecquois. Dans ce cas, il ne pouvait s'agir que d'apostats et les Musulmans n'avaient que faire de cette qualité de traitres, sinon de les exécuter ainsi que l’exigeait la pratique ; ils ne réclamèrent donc pas leur  récupération. La deuxième partie de la clause  qui prévoyait de renvoyer à La Mecque les nouveaux convertis à l'Islam allait connaître quant à elle, un dénouement inattendu. Découragés par un tel obstacle, et plutôt que de rejoindre Médine et d'être extradés, les Mecquois nouvellement convertis à l’Islam, constituèrent dans le désert une organisation « d'éléments incontrôlés » qui s'attaquèrent aux caravanes des idolâtres qoraïchites, leur menant la vie dure.

Devant la tournure des événements, les responsables mecquois demandèrent une révision de la clause  en question et insistèrent pour que le Prophète prenne sous son contrôle ces éléments qui étaient livrés à eux-mêmes. Désormais, ces derniers pouvaient être accueillis librement à Médine et cela à la demande de leurs ennemis ! Dans la rédaction des clauses de style, l'amputation de la formule introductive ne changeait rien au fait que Dieu était bien le Clément et le Miséricordieux,  et que le Prophète Mohammed tout en étant le fils d’Abdallah soit également l'Envoyé de Dieu. Les Mecquois devaient d'ailleurs bientôt l'apprendre à leurs dépens. Ainsi s'explique la révélation coranique qui parle « d'une victoire éclatante », là où les fidèles musulmans avaient cru trébucher sur un revers humiliant. Le Coran dit : « Nous t’avons accordé une victoire éclatante, afin qu’Allah te pardonne tes péchés passés et futurs, qu’Il parachève Sa Grâce en toi et te dirige sur la voie droite. Allah te donne un puissant secours. C’est Lui qui a fait descendre la quiétude (sakina) dans le cœur des croyants, afin que leur foi augmente. » (Coran. 48. 1 à 4) Le pacte de Hodaïbiya allait permettre au Prophète de passer à la vitesse supérieure en donnant au Message coranique la résonnance internationale qui lui manquait encore.  La nouvelle religion venait de sortir de son milieu régional et étendait son emprise.  L’Envoyé de Dieu députa huit ambassadeurs porteurs de messages personnels auprès des dirigeants des principaux pays de la région, pour les convier à l'Islam. Les sources historiques précisent qu'il s'agit de :

1.  L'Empereur byzantin d'orient Héraclius 1er.  

2. Le roi sassanide Khosro II, roi de Perse.

3. Le Négus (Nadjaschi) AI Adhkham, roi d'Abyssinie.

4. Le Gouverneur des Coptes (Egypte), Muqauqas.

5. Le Gouverneur de Syrie, Harith.

6. Le Prince du Yemama, Haudsa.

7. Le Prince d’Oman, Djaffar Ben Djolonda.

8. Le Gouverneur de Bahreïn.

 Les émissaires lui rapportèrent des réponses différentes. Le roi d'Abyssinie accepta sa conversion à l'Islam. Le gouverneur copte d’Egypte,  répondit par une missive bienveillante mais ne renia pas le Christianisme. Le roi de Perse Khosro II, déchira la lettre et ordonna à son gouverneur du Yémen de capturer Mohammed ou de lui ramener sa tête, pour avoir osé s’adresser à un personnage de son rang. Il ne put savourer ce plaisir et fut assassiné par son propre fils Kavâdh-Schiroui, en l’an 628, qui le remplaça à la tête du royaume et annula les ordres de son père. D'autres ne donnèrent pas de réponse. Mais cela est tout à fait secondaire. L'objectif que s'est assigné le Prophète avait été largement atteint. La religion musulmane était sortie de sa coquille et partait à la conquête du monde. Les premiers ambassadeurs de l'Islam avaient ouvert la voie à la diffusion du Message divin qui s'est réalisée avec une rapidité extraordinaire. Quelques années plus tard, la presque totalité de ces territoires,  adoptaient la religion islamique.

Comme convenu lors du traité de Hodaïbiya vint le temps du pèlerinage. Le Prophète laissa les armes et les chevaux en dehors de la ville mais suffisamment près pour parer à toute éventualité. Les Mecquois sortirent de la cité, livrée pendant trois jours aux pèlerins musulmans, qui s'adonnèrent pour la première fois dans l’histoire de l’Islam,  au rituel sacré prescrit par la nouvelle religion, qui n'a pas varié à ce jour. Les idolâtres furent impressionnés par la foi ardente des croyants, ce qui devait amener un peu plus tard la conversion d'hommes célèbres comme Khalid Ibn Walid ou 'Amr Ibn El 'As, les deux généraux de l’Islam, considérés comme les meilleurs stratèges de l’époque, qui furent les artisans de grandes victoires. Après avoir effectué le « petit pèlerinage »ou « Omrat el Qada »qui a lieu en dehors de la période traditionnelle du grand pèlerinage appelé « Hadj », les Musulmans quittèrent la Mecque comme convenu et les idolâtres reprirent possession des lieux sacrés.

Au cours de la huitième année de l'Hégire, il y eut plusieurs expéditions avant celle de Mou'ta qui mit aux prises un contingent de l'armée musulmane et une armée chrétienne composée d'Arabes ghassanides et de Byzantins. Les effectifs de l'armée chrétienne étaient considérables. Les chroniqueurs parlent de 100 à 200 000 combattants contre 3 000 guerriers pour les Musulmans. Malgré l’énorme disparité des forces, le combat s'engagea en territoire ennemi. Zaïd, l’ancien esclave et fils adoptif du Prophète, qui commandait le détachement ainsi que ses deux adjoints furent tués de même que nombre d'autres Musulmans. Khalid Ibn Walid, que le Prophète avait surnommé « L'Epée de Dieu »et qui avait été la cause de la défaite des Musulmans à Ohod,  lorsqu’il était encore idolâtre, prit le commandement, réorganisa ses troupes et  lança une offensive. Cependant, les forces adverses étaient trop nombreuses. Les Musulmans durent décocher et revenir à Médine. Il est intéressant de signaler que dans les instructions qu'il leur avait données avant le départ, le Prophète recommanda à ses troupes d'épargner les enfants, les femmes, les vieillards ainsi que les moines et de ménager les maisons, les cultures et les arbres. Une attitude à mettre en parallèle avec les faits d’armes bibliques et les conquêtes coloniales et les conséquences à tirer d’un tel enseignement.

Au retour de cette expédition, le Prophète entreprit les préparatifs afin  de délivrer La Mecque de l’idolâtrie. Le traité qui régissait les relations entre les Musulmans et les Qoraïchites venait en effet d'être rompu à l’initiative de ces derniers et les Musulmans n'étaient plus tenus de respecter des engagements devenus caducs. Une armée de 10 000 combattants fut mise sur pied. Elle était commandée par les meilleurs généraux et avait à sa tête le Prophète en personne. Elle arriva en vue de La Mecque au mois de Ramadhan (Janvier 630). Son importance jeta le désarroi dans le coeur des idolâtres. Ils dépêchèrent Abou Sofiane pour tenter une ultime démarche et retarder une échéance, qui avançait à grands pas. Elle fut  vouée bien évidemment à l'échec. Il ne restait plus à ce dernier qu'une seule chance de sauver la situation et sa propre vie : se convertir à l'Islam. Et là, il a dû certainement sentir tout le poids de la Clémence et de la Miséricorde que ses agents avaient cru dénier au Seigneur de l’univers, lors de la conclusion du traité de Hodaïbiya par ses sbires. C'est de par ces nobles vertus propres à la religion musulmane que lui furent pardonnés et sa rébellion contre l'Islam, durant vingt ans, et tous les crimes dont il était tenu responsable en sa qualité de chef mecquois des idolâtres.

Le Prophète alla encore plus loin dans la mansuétude et annonça que quiconque se réfugierait dans la demeure d'Abou Sofiane serait en sécurité. Comme ses ennemis étaient trop nombreux pour tenir dans la maison de ce dernier, il ajouta : « Celui qui se réfugiera dans la Maison Sacrée de la Kaâba, sera en sécurité et celui qui jettera ses armes et s'enfermera chez lui sera aussi en sécurité. » Ainsi, alors qu'il était puissant,  victorieux et que rien ne pouvait lui résister, il offrit avec son coeur la sécurité et la paix à  ses ennemis.  Une  grandeur d'âme et une  noblesse de comportement, inconnue dans l’histoire de l’humanité, tant ancienne que contemporaine, aussi bien en Orient qu’en Occident !

Les Mecquois se concertèrent pour arrêter une ligne de conduite. Finalement et en dépit des renforts de leurs confédérés ils estimèrent qu'ils n'étaient pas en mesure de s'opposer aux Musulmans et s'enfermèrent dans leurs demeures, afin d’avoir la vie sauve. Le Prophète divisa ses troupes en plusieurs unités et investit la ville des quatre côtés à la fois. Une faible résistance d'irréductibles se manifesta, mais elle fut vite réduite au silence. Il s'avança vers le Temple Sacré de la Kaâba et fit son entrée solennelle le 20 du mois de Ramadhan. Il était monté sur une chamelle et ne cessait de se prosterner en signe d'humilité et en hommage à la Gloire d’Allah, le Seigneur  et le Créateur de l’univers.

 Les idoles qui encombraient la Maison Sacrée furent enlevées et brisées.  Les sources historiques parlent de 360 statues, dont la plus grande par ses dimensions et aussi la plus vénérée Hobal, fut projetée à terre et placée devant le seuil de la Kaâba, afin que  ceux qui  pénètrent  dans le Temple, puissent la fouler aux pieds et démontrer son inanité.  Les Mecquois, du moins ceux qui étaient encore habités par l'idolâtrie n'en revenaient pas de voir leurs dieux abattus, détruits, pulvérisés  et utilisés comme marchepieds par les pèlerins musulmans. Il est évident qu'au fond de leurs cœurs, nombre de polythéistes endurcis ne s'étaient pas privés d'appeler de tous leurs vœux quelque calamité vengeresse, pour punir ces derniers de leur ignoble forfait. Mais rien ne se passa. Figées dans leur éternelle stupidité, les statues étaient écrasées, broyées, anéanties par ces hommes nouveaux qui vouaient un culte unique  à Allah,  le Seigneur et Créateur de l'Univers.  Et,  chaque fois qu'une idole était délogée de son socle et s'abîmait à terre, un  cri sortait des milliers de poitrines réunies autour de la Maison Sacrée : « Allahou  Akbar ! », (Dieu est le Plus Grand !).

Lorsque la Kaâba fut débarrassée des vestiges de l’idolâtrie qui l'encombraient et des représentations profanes, le Prophète Mohammed, que le Salut et la Bénédiction d’Allah,  soient sur lui, entra et accomplit une prière dédiée à la Gloire d’Allah. Puis après avoir prononcé les  louanges d’usage, à Son intention, il s'adressa à la foule anxieuse et apeurée qui s’était massée, en prononçant cette formule  désormais célèbre : « Habitants de la Mecque, comment dois-je agir envers vous ? »

Lasuite de ce discours a été développée plus haut, lorsque  Sohaïl Ibn 'Amr qui était encore idolâtre,  se leva et dit : « Je pense que toi qui est un noble Qoraïchite, issu d'une famille noble, qui reviens dans ta patrie triomphant de tes compatriotes, tu as l'intention de traiter avec pitié les vieillards, d'amnistier les jeunes gens, d'épargner les femmes et les enfants, de les gracier tous, de leur pardonner et de leur laisser la liberté. » Après son pardon, le Prophète  regagna sa tente.

Le lendemain et pendant trois jours, les Mecquois vinrent prononcer la formule de foi et prêter serment  d’allégeance et de fidélité devant le Prophète. Cette formule consiste à dire : « Il n’existe  aucun autre dieu en dehors d’Allah et Mohammed est Son Prophète. » Puis,de petites expéditions furent lancées contre les tribus environnantes pour obtenir leur soumission. C'est au cours de l'une d'elles que furent détruits les sanctuaires consacrés aux deux autres idoles vénérées par les Arabes idolâtres: Manât et Al'Ozza.

Après avoir délimité le périmètre du territoire sacré de La Mecque, le Prophète fut informé qu’une menace militaire se profilait à quelques deux ou trois jours de marche, à l'Est. Il s'agissait d'une coalition formée par les tribus des Béni Hawazin, des Béni Hillal et des Thaqif qui parvinrent à lever une armée  composée de 30 000 guerriers, qui se disposaient à passer à l’attaque. Le Prophète prit les devants et partit à leur rencontre à la tête d’une troupe de 12 000 combattants. Le 30 Janvier 630, ils arrivèrent à Honaïn et furent impressionnés par l'énorme masse humaine qui se présentait devant eux. Leur chef avait en effet décidé de faire suivre les guerriers par les femmes, les enfants et leurs troupeaux de bétail. Le tout constituait une mer qui ondulait  et ondoyait sous le soleil, à perte de vue. Dès le début de l’action, les Musulmans éprouvèrent les pires difficultés face à cette multitude et  nombre d’entre eux  furent tués ou blessés. D'autres s'enfuirent. Mais le Prophète qui était entouré de ses fidèles, fut stoïque et tint bon.

 Dans le désordre indescriptible des combats, il réussit à rallier une partie de son armée en pleine déconfiture et lança des charges furieuses et répétées contre le corps principal de l'armée ennemie, jusqu’à rompre leurs rangs et désorganiser leur système de défense.  Ce fut alors une  panique générale parmi leurs troupes. Les combattants s'enfuirent de tous les côtés, abandonnant leurs femmes et leurs enfants, leurs troupeaux et  leurs biens, pour se réfugier à Taïf, ville fortifiée. Cette même ville dont les habitants, chassèrent le Prophète au  début de son apostolat, lorsqu’il est venu chercher protection.

La ville fut assiégée durant vingt-cinq jours par les troupes musulmanes, mais refusa  de se rendre. Les Musulmans se retirèrent alors, non sans ramener avec eux,  en guise de butin, les familles des vaincus et un  butin considérable. Constatant qu'ils avaient tout perdu dans les combats, ces derniers se convertirent à l'Islam et vinrent réclamer leurs familles. Ils savaient  qu’il ne leur restait que ce moyen pour échapper à un sort qui aurait pu être autrement plus dramatique. Après leur conversion, leurs biens et leurs familles leur furent restitués,  et ils furent libres de leur personne. La défaite des Hawazin mit un terme, du moins en Arabie, aux grandes concentrations guerrières agressives. C’est aussi à Taïf que fut détruite, l’autre idole, appelée Al Lat.

Puis, le Prophète effectua une visite en état pénitentiel des lieux saints de La Mecque avant de retourner à Médine, la ville qui lui avait offert l’hospitalité à ses débuts.  Là, il apprit que les Ghassanides (Arabes chrétiens) se préparaient à nouveau à la guerre et menaçaient leur sécurité. En pleine chaleur d’été, il organisa une expédition de 30 000 hommes et se rendit à Tabouk, à 600 kilomètres au nord, aux confins de la frontière syrienne. Il ne rencontra pas l'armée byzantine et établit son campement sur place. Les tribus d'alentour, impressionnées par le déploiement de forces, vinrent prêter des serments d'allégeance et le Prophète leur délivra des lettres de paix, qui leur assuraient la sécurité et la protection des troupes musulmanes.

Après quelques semaines de halte, il retourna à Médine. Désormais son autorité et son influence s'exerçaient pratiquement sur toute l'Arabie et sur une partie des territoires environnants. Des coins les plus reculés de la péninsule, des délégations de tribus se pressaient à Médine pour se convertir, établir des alliances et solliciter la sécurité. Une nouvelle ère venait de commencer dans la région. Elle allait s'étendre sur une partie notable du monde. Le Prophète réorganisa l'administration et nomma des agents pour son fonctionnement. Durant la neuvième année de l'Hégire, il interdit aux païens, aux idolâtres et aux incroyants,  de s'approcher de la Maison Sacrée. L'année suivante, il décida d'accomplir le pèlerinage (Hadj) à la Kaâba, à l’occasion de l’Aïd el Adha. L'événement eut un tel retentissement qu'il regroupa 140 000 personnes.

Mohammed se présenta en état d'ihram (sacralisation) à La Mecque monté sur une chamelle blanche, en répétant la formule suivante : « Me voici à Toi, ô Allah ! Me voici venant à Toi. Tu n'as pas d'associé. A  Toi Seul les Louanges, l'Adoration, l'Autorité Suprêmes. » Puis il exécuta les différents rites avant de se rendre au Djebel Rahma, à Arafat et de prononcer son discours d'adieu. Il rappela les principes fondamentaux du Coran, exhorta les pèlerins à s'y conformer en toutes circonstances et les invita à transmettre le message aux contrées éloignées et aux générations futures. A chaque recommandation, il s'arrêtait et posait la question suivante : « Ai-je communiqué le message ? « Oui,  répondait la foule émue aux larmes. » Il reprenait : « Ô Allah, Sois en témoin ! »

Quand il eut  terminé son discours,  le vendredi  9 Dou l'Hidja, il descendit dans la vallée sur le dos de sa monture ;  alors il reçut la dernière et ultime révélation qui devait mettre un terme au Coran et clore  définitivement le cycle des religions divines et des Envoyés de Dieu, à destination de l’humanité. Désormais, jamais plus un Elu de Dieu, n’apparaîtra sur terre  pour  s’adresser au genre humain et communiquer un Message divin. L’ère des révélations divines qui  débuta avec Adam, venait de prendre fin, avec le Prophète Mohammed, le sceau des Messagers de Dieu,  que le Salut et la Bénédiction d’Allah soient sur lui. La chamelle ploya sous le poids de l’ultime révélation et allongea sa tête sur le sol en signe de soumission. (C’est Dieu qui parle) : « Aujourd'hui, J'ai parachevé votre religion, Je vous ai comblés de la Plénitude de Ma Grâce et J'agrée pour vous l'Islam comme religion. ». (Coran 5. 3) Ainsi prit fin la révélation coranique.

Le dernier pèlerinage est connu sous le nom de Pèlerinage d'adieu, parce que le Prophète, qui recevait la visite de l’Ange Gabriel, une fois par an, pour lui faire réciter le Coran, afin de valider son authenticité, exigea cette année une double récitation, signe qu’il ne reparaîtrait  plus et que désormais le Livre Sacré était à l’abri de toute altération,  d’autant qu’il avait été déjà consigné intégralement par écrit, sous le contrôle du Prophète.  Dès lors, celui-ci était conscient qu’il s’agissait de sa dernière année. Quelques jours plus tard, il quitta La Mecque qu'il ne devait jamais plus revoir. Ses forces commençaient à décliner, il était souvent souffrant. Pendant vingt-trois ans, temps que dura la transmission du Message coranique, il subit des épreuves épuisantes, harassantes. Au mois de Moharrem de la 11ème  année de l'Hégire sa maladie s'aggrava. Il se plaignait de violents maux de tête.

Profitant de la situation, quelques mystificateurs se prévalant de la qualité d'envoyés de Dieu, firent leur apparition et essayèrent de gagner à leur cause la population. Les trois principaux usurpateurs furent :

- Aswad, qui apparut au Yémen. Il faisait des tours de prestidigitation et incitait ses disciples à refuser le paiement de la zakat.

- Mossaïlima du Yemama. Il dispensa ses adeptes de la prière, autorisa la consommation des boissons alcoolisées et introduisit la pratique de la liberté sexuelle.

- Tolaïha de la tribu des Béni Assad. Il exempta ses fidèles de l'obligation de la prière et du jeûne.

Malgré les allègements et les facilités qu'ils accordèrent à leurs adeptes, tous les faux prophètes furent éliminés, victimes expiatoires de leur imposture. Quand l'état de santé de Mohammed s'aggrava, il emménagea chez sa femme Aïcha, la fille de son fidèle ami Abou Bakr. Il avait une forte fièvre et était allongé. Il demanda à ce dernier de présider la prière à sa place car il n'était plus en mesure de le faire. Le sixième jour du mois de Rabi' el Aouel, se sentant un peu mieux, il se rendit à la mosquée et prononça son dernier sermon. « Si la mort est une nécessité, dit-il, il existe après elle, un jour de justice où les hommes feront des réclamations les uns les autres. Les puissants de la terre réclameront contre les faibles et ceux-ci contre les grands. Il n'y aura de faveurs ni pour moi ni pour personne. Maintenant que je suis encore parmi vous, réclamez-moi votre dû. Si j'ai frappé quelqu'un, voici mon dos, qu'il exerce la loi du talion. Si j'ai offensé quelqu'un, voici mon honneur, qu'il en tire vengeance. Si j'ai pris le bien de quelqu'un, qu'il le reprenne. Purifiez-moi aujourd’hui de toute injustice afin que je puisse comparaître devant Allah, sans blâme et sans reproche envers personne. »

Les assistants répondaient émus : « Ô Prophète, nous sommes nous-mêmes tes débiteurs ! » Ensuite il regagna sa demeure. Il était de plus en plus malade. Quelques jours passèrent et son mal ne cessait d'empirer. Comme il ne pouvait plus setenir assis, il posa la tête sur les genoux de sa femme. Il transpirait beaucoup et ne cessait de répéter à voix basse : « Il n y a aucun dieu en dehors d’Allah Lui-même.  Il dit encore : « Quelle agonie dans la mort! ». Puis il murmura: « Avec le compagnon le plus haut. » Il ouvrit la bouche, la referma et rendit l'âme,  le lundi 12 du mois de Rabi ' et Aouel. (Juin 632). Ce fut la stupéfaction chez les Musulmans qui refusaient de croire que le Prophète de Dieu était mort. La foule se rassembla devant sa demeure. Abou Bakr dut intervenir énergiquement afin de dissiper les doutes et prononça ces paroles historiques : « O Musulmans, Mohammed a quitté ce monde. Que ceux qui adoraient Mohammed sachent qu'il est mort, mais que ceux qui adorent Dieu, sachent qu'il est Vivant et ne meurt jamais. »

La foule accepta alors la réalité dans une profonde émotion. Le Prophète fut enterré à l'emplacement même où il rendit le dernier soupir,  là où se trouve maintenant la grande mosquée de Médine. Ainsi, s'éteignit l'homme le plus admiré et le plus controversé de tous les temps. Admiré par ceux qui l'ont côtoyé durant toute la vie et pris comme gages, sa sincérité, sa loyauté, son courage, son désintéressement, sa foi inébranlable et son intégrité absolue qui plaident en faveur de l'authenticité absolue de sa Mission prophétique. Controversé par ceux qui avaient à lui opposer des ressentiments injustifiés dont la conscience a été forgée dans les ténèbres du Moyen Age, et qui sont eux-mêmes en manque de reconnaissance divine. Et dominant les problèmes conjoncturels, la Parole d’Allah Unique et Tout-puissant, préservée dans le Coran Sacré, restera à jamais le témoin solennel qui jugera entre les hommes le Jour de la Résurrection,  afin que chacun reçoive son dû, en bien ou en mal, sans que personne ne soit lésé.


 

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